Rencontre avec Hugo & Pauline Villa

Enfants de Pierre-jean Villa
RENCONTRE AVEC HUGO ET PAULINE VILLA, VIGNERONS DE LA VALLÉE DU RHÔNE
LE VIN A-T-IL TOUJOURS ÉTÉ UN POINT D'INTÉRÊT POUR VOUS ? QUELLE A ÉTÉ VOTRE ÉDUCATION FAMILIALE AUX VINS ?
"De part le métier de mon père, le vin a toujours fait partie de ma vie. Le domaine ayant été créé assez récemment, en 2009, cela n'a pourtant pas été inné. Je ne suis pas née dans une cuve ou dans les vignes comme d'autres vignerons. Cependant, mon père a toujours travaillé dans le vin et discuté de son métier à table. C'est lors de ses discussions que j'ai pu apprendre sur les différents milieux de la viticulture et que le vin est devenu une soucre d'inspiration. Un attrait est né pour son métier et pour les métiers de bouche, ce qui rejoignait aussi ma passion."
QUELLES ONT ÉTÉ VOS EXPÉRIENCES DANS LE MONDE DU VIN, VOTRE FORMATION ?
"J'ai dabord fait un master en commerce spécialisé sur l'aspect managérial. Par la suite, j'ai poursuivi avec un second master en commerce international des vins et spiritueux à Dijon. Une fois sortie des études, j'ai été caviste en totale autonomie pendant 1 an et demi à Vienne. Par la suite, j'ai eu une petite expérience dans le Sud de la France pour découvrir le commerce export qui m'a fait comprendre que les grosses structures ne me correspondaient pas. Je suis donc revenue sur le domaine officieusement à partir de fin 2021, et officielement à partir de mars 2022. De son côté, Hugo a eu un cursus un peu plus technique. Il a fait un BTS Viti-oeno, puis une licence Supagro à Montpellier avant d'aller travailler dans des domaines. Il a fait des vinifications en Bourgogne et en terrasses du Larzac avant de revenir sur le domaine familial."
QUEL A ÉTÉ LE MOMENT CLEF POUR VOUS DÉCIDER À PRENDRE LA SUITE ?
"Déjà à la fin de mon cursus en école de commerce, c'était devenu une évidence que j'allais travailler dans les vignes. Après mes expériences, je souhaitais partir dans les vignes à l'étranger, mais le Covid a un peu bousculé les choses. Pour m'occuper, je suis venue sur le domaine donner quelques coups de main. À ce moment-là, nous avons fait construire notre nouvelle cave et nous sommes devenus propriétaires de nos locaux. Suite à ça, j'y avais déjà mis un ou deux orteils, et cela m'a donné envie de mettre les deux pieds dedans. Je n'arrivais plus à travailler ailleurs sans penser au domaine et au projet. Je suis donc revenue presque pour l'emménagement. Mon frère y était déjà depuis quatre ans donc je pouvais m'appuyer sur lui. Pour sa part, le déclic est arrivé deux ans et demi après son bac, lors de sa première formation en ingénieur dans l'environnement, pour lequel il n'a eu aucun attrait. Il a donc décidé de se former dans le vin dans l'objectif de reprendre le domaine."
LA TRANSMISSION A-T-ELLE TOUJOURS ÉTÉ UNE ÉVIDENCE POUR VOUS COMME POUR LE RESTE DE LA FAMILLE ?
"C'était une évidence du côté de mon père, dans le sens où si on était demandeur, il aurait été favorable pour la transmission. Cependant, nos parents de nous ont jamais mis la pression ni à moi, ni à mon frère, pour reprendre le domaine. Après, il n'auraient fait tous ces investissements ces dernières années si on ne leur avait pas dit que nous souhaitons reprendre. C'est donc devenu une évidence il y a quelques temps et ils se sont investis pour que nous arrivions dans de bonnes conditions."
QUELS SONT VOS PROJETS POUR LE DOMAINE ?
"On s'était toujours fixé la limite de 20 hectares en propriété et nous sommes actuellement en train de l'acquérir. Il y a surtout des projets en viticulture avec, comme prochaine étape, de passeren biodynamie (après avoir obtenu la certification en agriculture biologique en 2021). Avec mon frère, on a lancé des essais sur certaines parcelles. On a un autre projet sur de l'agroforesterie avec une parcelle d'un hectare en test sur les hauteurs de Chavanay, où on a planté des arbres et des plants de Syrah en partenariat avec le parc du Pilat. Ce sont des résultats qui seront visibles dans 10 à 20 ans minimum. Le but est de s'inscrire dans la transmission de notre sol et de notre terroir, avec des moyens pour travailler la vigne le plus sainement possible.
À côté de cela, avec Hugo on a créé en 2022 notre domaine qui s'appelle "Hugo & Pauline Villa". Sur ce domaine, la majorité des raisins sont de l'achat. Petit à petit, le souhait serait de récupérer des vignes. On a une gamme du domaine familial avec des vins un peu "gastro" que "bistrot", et des contenants différents. D'un côté, il y a la reprise du domaine familial dont on est très fier, et de l'autre, il y a notre domaine où on va pouvoir s'amuser sur des choses qui nous ressemblent et sur lesquelles nous aurons la main mise à 100%. Les deux domaines restent joints."
EN QUOI VOTRE VISION DU DOMAINE ET DU TERROIR EST-ELLE DIFFÉRENTE DE LA GÉNÉRATION PRÉCÉDENTE ?
"On a une vision différente au niveau du terroir qui a subi des traitements chimiques ces dix dernières années. Notre générationen a plus que conscience et nous n'avons plus le choix de remettre une terre saine et des vignes qu'on traite le mieux possible. Il y a aussi les changements climatiques auxquels on se prépare à faire face et dont la génération de mon père n'était pas encore concernée il y a 30 ans lorsqu'il a commencé. À la fois, nous avons une vision similaire dans le sens où, avec Hugo sur le nouveau domaine qu'on a créé, nous restons sur des cépages très identitaires. On travaille la Syrah, le Viognier, la Marsanne, etc... ce qui reste l'ADN de la Vallée du Rhône septentrionale. On garde le respect des traditions tout en faisant face aux nouvelles difficultés."
TRAVAILLER EN FAMILLE, UN POINT FORT, UN POINT FAIBLE ?
"Le point fort serait qu'on se connaît tellement par coeur, qu'on est très complémentaire, ce qui a facilité l'identification des rôles et la division des tâches. Le point faible, que je définirais comme le piège de travailler en famille, est la tendance à moins communiquer, en supposant que l'autre sait déjà ou qu'on en parlera au repas de famille. Au démarrage, nous sommes tous partis de notre côté sans poser de bases pour travailler à quatre. On a donc mis en place une réunion de famille par mois où on discute de ce qu'il s'est passé et des projets à venir."
UNE CUVÉE PRÉFÉRÉE ?
"Mon coup de coeur à chaque étape de la vinification, des raisins rentrés au premier jus, à l'élevage pendant l'hiver, c'est "Esprit d'Antan" en rouge en IGP Collines Rhodaniennes. C'est une identité, une typicité des terroirs et un profil marquant qu'on retrouve chaque année en dégustation. On est sur des terroirs de schistes, sur nos parcelles les plus au Nord sur la rive gauche, qui donne des Syrah d'une superbe finesse. J'espère qu'elle deviendra le prochain cru de la Vallée du Rhône car elle a tout pour."